La Hongrie perd la confiance des marchés et de Bruxelles


La position de la Hongrie sur les marchés se détériore de plus en plus. Les taux d'intérêt sur la dette publique s'envole et le forint se déprécie rapidement. A la défiance des investisseurs s'ajoute celle des autorités européennes.



La Hongrie perd la confiance des marchés et de Bruxelles
La Hongrie traverse depuis le mois de décembre une crise croissante sur les marchés financiers, illustrée à la fois par l'explosion des taux sur la dette publique et par une dépréciation très rapide du forint face à l'euro.

Le taux d'intérêt sur la dette souveraine est ainsi passé de 7,5 % en moyenne sur 2010 et les trois premiers trimestres de 2011 à plus de 10 %. Le taux 10 ans approche les 11 % depuis cette semaine. Sur le marché obligataire, le stress est revenu sur son niveau de fin 2008 et début 2009. Ce taux n'est dépassé en Europe que par la Grèce et le Portugal, pays sous assistance.

Le taux de change entre la devise hongroise et l'euro est très forte hausse. L'EUR/HUF s'est déprécié de 7,8 % depuis le mois de septembre et la parité est désormais plus défavorable au forint qu'elle ne l'était au pic de la crise financière de 2008-2009.

Enfin, la bourse de Budapest enregistre un recul de 25 % (indice BUX) depuis juin dernier contre un recul de 15 % pour l'Eurostoxx 50 sur la même période.

Cette perte de confiance a été déclenchée par l'adoption et la mise en place d'une politique nationaliste par le gouvernement actuel. La modification constitutionnelle adoptée fin 2011 a supprimé de fait l'indépendance de la banque centrale, où plus de la moitié des membres ayant le droit de vote dans les décisions monétaires sont désormais liés au gouvernement. La mise en œuvre de mesures fiscales punitives envers les filiales de groupes étrangers et la nationalisation des fonds de pensions privés participe aussi à réduire l'attrait du pays pour les investisseurs étrangers.

Les données sur les flux de capitaux ne sont pas disponibles sur les derniers mois, mais il est vraisemblable qu'une partie de la dépréciation du forint soit liée à des sorties de capitaux auparavant placés sur les marchés actions et obligataires du pays.

Dans ce contexte de marché très tendu, la Commission européenne a publié aujourd'hui deux décisions sur la modification du statut de la banque centrale et sur la politique budgétaire du pays.

D'une part, la Commission considère que l'indépendance de la banque centrale est remise en cause (cf. communiqué), ce qui est en infraction avec le droit communautaire. Selon les traités de l'UE, toutes les banques centrales nationales doivent être indépendantes du pouvoir politique, y compris pour les pays non membres de la zone euro.

D'autre part, pour la Commission, la Hongrie est menacée d'une procédure pour déficit public excessif (cf. communiqué). Si le budget en 2011 sera excédentaire de plus de 5 % du PIB, c'est uniquement du à des mesures temporaires (nationalisation et impôts exceptionnels sur les filiales de groupes étrangers). Le déficit fut de 5,3 % du PIB en 2009 et devrait retomber autour de ce niveau en 2012.

L'ouverture de cette procédure est conditionnée à l'accord des chefs d'Etat et de gouvernement (seuls décisionnaires). Une éventuelle sanction financière ou l'arrêt du versement des fonds structurels (environ 1 milliard d'euros par an pour la Hongrie) ne sont donc pas pour tout de suite.

Le pays a des besoins de refinancement très conséquent (dette publique 2010 : 86 % du PIB selon l'OCDE; 80 % suivant les critères de Maastricht) et un déficit toujours très important sur 2012 (entre 5 et 6 % du PIB suivant les estimations). Le marché obligataire se fermant pour la Hongrie, ceci rend un plan d'aide impliquant l'UE et le FMI inévitable pour éviter un défaut de paiement. Les relations tendues entre ces institutions et le gouvernement alimentent un peu plus le risque de défaut donc la défiance des investisseurs.

Enfin, les crédits au secteur privé libellés en devises étrangères (franc suisse ou euro) représentent 18 % du PIB. La dépréciation du forint se traduit donc automatiquement par un alourdissement de la charge de la dette et un risque financier très important pour les banques locales, augmentant le risque d'une crise bancaire majeure.

Équipe Gecodia.fr

Vendredi 13 Janvier 2012



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